RDV HLM

Publié le par Martin Julhès

L'Auditorium des Archives Départementales de la ville de Marseille accueillait mardi 15 décembre un colloque destiné aux professionels et organisé par HorsLesMurs, sur le thème des arts et de la rue et des arts du cirque dans la politique de la ville. La journée était divisée en cinq parties, à savoir : une partie destinée à poser le cadre et à introduire le colloque, trois tables rondes où ont pu s'exprimer diverses personnalités invitées et pour finir une ouverture sur Marseille-Provence 2013, sans grand intérêt puisque tout ou presque a été dit sur le sujet. Soulignons néanmoins la prise de parole de Guy Carrara, directeur artistique du CREAC - Centre de Recherche Européen des Arts du cirque, car ce fut l'unique fois où il ait été question de cirque malgré le fait que le colloque soit en partie dédié à ce domaine.

La politique de la ville, née en 1976, consiste en un ensemble d'actions de l'État visant à revaloriser certains quartiers urbains, à améliorer le cadre et la qualité de vie des habitants et à réduire les inégalités sociales entre territoires. Elle comprend des mesures législatives et réglementaires dans le domaine de l'action sociale et de l'urbanisme, dans un partenariat avec les collectivités territoriales reposant souvent  sur une base contractuelle. La politique de la ville oblige les différents départements ministériels à coopérer entre eux, mais implique aussi un partenariat entre l'État et les collectivités territoriales concernées. L'État intervient alors dans le cadre de contrats conclus avec les communes et autres acteurs locaux : ce sont les « Contrats Urbains de Cohésion Sociale » (anciennement « Contrats de Ville »). Cette action repose sur une cartographie préalable du territoire urbain, qui identifie les quartiers qui feront l'objet d'aides : les « zones urbaines sensibles ».

On soulignera en première partie les interventions de Pascal Raoust, chef de projet politique de la ville des quartiers Nord de Marseille - que j'avais eu l'occasion de rencontrer lors de mon séjour aux ateliers Sud Side l'hiver dernier, dans le cadre d'une réunion pour la mise en place d'un projet avec les minots du quartier des Aygalades (où est implantée la Cité des Arts de la Rue) et qui rentrait justement dans le dispositif de financement de la politique de la ville - et de Paul Blancard, philosophe et sociologue, dont le portrait qu'il a dressé de notre société avec son évolution depuis des temps anciens n'a pas laissé l'auditoire de marbre.

La table ronde numéro 1 a opposé dans un débat Stefan Bonnard,
co-directeur artistique de la compagnie Komplex Kapharnaum à Villeurbanne, et Frédérique Fuzibet, co-directrice du Théâtre de la mer à Marseille. Stefan Bonnard a exprimé sa vision de l'intervention artistique dans les quartiers, intervention qu'il ne juge pas toujours légitime et dont il ne faut pas selon lui attendre des miracles, il a longuement insisté sur l'importance qu'a l'artiste de savoir ce qui le pousse à créer et ce qui donne du sens à son travail. L'artiste serait alors avant tout force de proposition et ne doit surtout pas se poser en donneur de leçon, ce qui ne l'empêche pas de mettre en avant le côté subversif de ses propositions artistiques. J'ai eu plus de mal avec le Théâtre de la mer, peut-être à cause de l'accent marseillais...

La table ronde numéro 2
a réuni Sarah Harper - auteur et chef de projet Friches Théâtre Urbain - et Clotilde Fayolle - chargée de production - qui nous ont présenté le Projet Witness / N14 à Clichy, Asnières Colombes, etc, ainsi que Gilles Cailleau, directeur artistique de la cie Attention Fragile. Interventions très intéressantes des uns et des autres, de beaux projets... Un intervenant témoin, le caractériel Jean Hurstel qui est president de Banlieues d’Europe (dont le siège est à Lyon dans les anicens locaux de Keep Smiling rue Vendôme), s'est un peu imposé comme une sorte de messie opérant dans les quartiers depuis de nombreuses années et a élevé la voix pour dire qu'il faut se poser la question de savoir pourquoi on décide d'intervenir dans les banlieues, qu'est-ce que cela induit. Dieu le Père - nous l'appellerons ainsi - a parfois quelque peu agacé par ses "je" et ses coups de gueule, mais comment ne pas être sous le charme devant tant d'expérience ?

Pour finir la dernière table ronde s'est intéressée aux projets artistiques qui jouent un rôle dans la rénovation urbaine. Nicolas Binet
, ex-directeur adjoint à la Samoa, SEM ayant mené le projet de l'Ile de Nantes (aujourd'hui directeur du Grand projet de ville à Marseille) nous a longuement parlé de la ville de Nantes sans jamais tarir d'éloges à son sujet, et à juste titre. Parallèlement un membre du collectif l'Entre-pont nous a présenté leur projet de la Halle Spada à Nice qui est une friche industrielle (les anciens entrepôts de l'entreprise de travaux publics SPADA) qui doivent acquérir à moyen terme une vocation culturelle.

Ce colloque, qui prouve une fois encore la volonté d'institutionnalisation croissante du secteur des arts de la rue, est resté à mes yeux beaucoup trop consensuel et aurait pu être l'occasion que l'assemblée débate enfin - étant donné qu'elle était composée de professionnels du secteur - sur des questions aussi importante que la place de l'artiste de rue face à cette cohésion sociale (ce qui n'a pas été assez développé à mon goût). La cohésion sociale qui est tant convoitée par les politiques consiste en grande partie à l'agrégation des individus de toutes conditions confondues vers des intérêts communs, ce qui fait ainsi coexister les inégalités présentes dans la société et ce qui à pour effet de détourner les classes les plus défavorisées de la révolte (rôle de pacification et de contrôle social en quelque sorte). C'est en cela à mon avis qu'un débat de fond est nécessaire, ce qui ne remet pas néanmoins en question la richesse des propos qui nous ont été donnés d'entendre au cours de ce colloque. Une fois encore, merci à HorsLesMurs.

Publié dans Report

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